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Jessica Lindl – Vice-présidente d’Unity, en charge d'Unity Social Impact

Utilisé par un grand nombre de développeurs de jeu et dans les industries qui ont besoin de simulation 3D, Unity est un moteur de jeu pour téléphones, ordinateurs et consoles. Unity et les Services Culturels, avec l’ONG Games for Change, ont été à l’initiative cette année et la Cross Cultural Impact Jam, réunissant 70 étudiants du Canada, des Etats-Unis, de France et du Sénégal, autour du thème “Amplifying Voices”. Jessica Lindl est la Vice-Présidente d’Unity, en charge de l’impact social et de l’éducation. Pour What’s Next, elle revient sur l’action volontariste de cette entreprise engagée pour rendre la technologie plus inclusive.

Unity est l’un des moteurs de jeu vidéo les plus utilisés au monde. En dehors de ce secteur, quelles sont les possibilités qu’offre Unity? 

Le recours à Unity dans d’autres domaines que le jeu vidéo est en très forte hausse, car on utilise de plus en plus la 3D en temps réel dans des secteurs comme l’architecture, l’ingénierie et la construction, l’automobile, le cinéma ou l’éducation. Mais ce qui me réjouit le plus, c’est son utilisation en tant qu’outil de narration. De nombreux créateurs s’en servent en effet pour sensibiliser l’opinion publique à des enjeux mondiaux tels que les injustices sociales et la discrimination raciale, le développement durable ou la santé mentale. Bon nombre de ces projets sont d’ailleurs élaborés en réalité virtuelle et augmentée, ce qui permet de susciter chez l’utilisateur final un degré d’empathie sans précédent.

Chez Unity, nous pensons que le monde est meilleur avec davantage de créateurs, et que la créativité peut et doit émaner de tous les horizons. Nos utilisateurs racontent des histoires ; pour qu’elles exercent une réelle influence, tout le monde doit pouvoir participer à leur élaboration. Je suis convaincue que de plus en plus de personnes de profils très variés vont utiliser nos outils et notre plateforme en vue de faire évoluer la société dans le bon sens.

Dans le domaine de l’éducation, quelles mesures pourraient être prises pour permettre à davantage de personnes aujourd’hui peu représentées dans la technologie de s’orienter vers ce secteur ?

Il faut commencer par accompagner davantage les enseignants. Nous devons leur donner les moyens d’enseigner efficacement les sciences, la technologie, l'ingénierie, les arts et les mathématiques en classe, de manière à multiplier les débouchés pour les élèves. Mon rôle consiste d’ailleurs en grande partie à rendre notre technologie aussi accessible que possible en milieu scolaire.

Nous nous sommes récemment associés à Gameheads, un organisme de formation en informatique basé à Oakland, en Californie, en vue de mettre sur pied un diplôme de conception de jeux au sein des départements des arts et de la formation continue de l’Université d’East Bay. Mettre à disposition des étudiants défavorisés les outils nécessaires à l’apprentissage de la 3D en temps réel – ce qui leur permet d’accéder à de nouveaux débouchés – s’inscrit pleinement dans le cadre de notre engagement en faveur des projets à impact social. Nous sommes parfaitement conscients que les qualifications techniques sont essentielles pour trouver du travail aujourd’hui, et qu’elles le seront encore davantage demain. En intervenant auprès de la population et en nous associant à d’autres acteurs clés du secteur, nous permettons aux jeunes de poser les bases solides de leurs futures carrières.

Que faites-vous concrètement pour aider les créateurs qui rencontrent des difficultés pour se faire une place ?

Chaque année, Unity fournit pour plus d’un milliard de dollars de matériel à des étudiants et organisations à but non lucratif, afin de rendre nos outils accessibles au plus grand nombre. Nous apportons également des aides financières par le biais de programmes comme Unity for Humanity, mené par notre département Unity Social Impact consacré aux projets d’utilité sociale. Celle-ci a pour objectif d’encourager et accompagner les créateurs 3D afin de leur permettre d’induire des changements sociétaux. Les projets sélectionnés se voient attribuer un financement et bénéficient de services d’encadrement et d’une assistance technique pour progresser dans la maîtrise de nos outils.

Lors de la création de ce département, nous avons également mis sur pied un fonds caritatif, Unity Charitable Fund, afin de disposer d’un mécanisme financier pour mener à bien nos projets. Grâce à ce fonds, nous pouvons venir directement en aide aux créateurs qui ont, ou souhaitent avoir, recours à nos solutions logicielles. Le fait d’avoir regroupé les initiatives d’utilité sociale au sein d’une branche spécifique et dotée d’un fonds dédié nous permet de renforcer notre action en faveur des créateurs et des communautés du monde entier.

Quel type de projets entendez-vous soutenir par le biais du programme Unity for Humanity ?

Très bonne question ! Comme je vous le disais, ce programme vise à encourager et accompagner les créateurs qui utilisent la technologie 3D en temps réel en vue d’induire des changements au sein de la société. Nous avons attribué ces dernières années un certain nombre de subventions qui suivent nos principaux objectifs en matière d’impact social, à savoir l’éducation et les débouchés économiques, le développement durable, ainsi que la santé et le bien-être, en veillant toujours à mettre en avant le principe d’inclusivité. Tout dernièrement, nous avons proposé une nouvelle aide en partenariat avec le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) et le Project Drawdown, dont bénéficieront les projets en 3D en temps réel consacrés aux questions de durabilité : lutte contre les changements climatiques, énergies propres, santé des océans, urbanisation durable, etc.

Nous organisons par ailleurs un sommet annuel dans le cadre de ce programme. Il s’agit d’un événement en ligne gratuit qui rassemble des créateurs, des militants, des organisations à but non lucratif, des donateurs, des mécènes et des entreprises ayant recours à la technologie 3D en temps réel pour produire des retombées sur le plan social et apporter des changements concrets. C’est une formidable occasion d’avoir une vue d’ensemble des projets de ce type qui sont menés à l’aide de la plateforme.

Il est assez difficile de mesurer l’impact positif de certains jeux sur la société. Pouvez-vous nous donner un exemple de projet qui a eu des effets notables sur une problématique sociale ?

Je pense que c’est une question à laquelle bon nombre d’entreprises et d’organisations tentent de répondre. Ceci dit, nous savons que ce phénomène est bien réel, puisque nous observons une augmentation impressionnante du nombre de projets qui traitent des problèmes les plus complexes et les plus urgents de la société.

Chacun des exemples ci-dessous poursuit un objectif bien précis et certains prévoient même des critères à remplir pour évaluer leur impact.

Future Aleppo est une expérience interactive en réalité virtuelle (VR) R qui permet aux enfants victimes de conflits de reconstruire leur maison et leur ville. Le projet s’inspire de l’histoire de Mohammed Kteish, un jeune Syrien qui s’est servi de débris tombés au sol pour construire une maquette de sa ville détruite par les bombardements. Ces images ont ensuite été transformées, à l’aide d’Unity, en une expérience totalement immersive et interactive afin de reconstituer la cité et redonner un peu d’espoir aux habitants d’Alep-Est. Les créateurs du projet travaillent désormais avec d’autres jeunes originaires de zones de conflit ou vivant en foyer afin de les aider à reconstruire eux aussi (virtuellement) leur ville et leur maison, de façon à leur redonner les moyens d’agir et de surmonter leurs traumatismes.

Samudra est un jeu de réflexion sur l’ écologie,en 2D et illustré à la main. Il retrace les aventures d’un enfant sur une mer polluée. Les joueurs y rencontrent des créatures sous-marines qui les aident à comprendre comment les actions des « habitants de la surface » contribuent à la pollution du monde subaquatique. Du fait de sa conception singulière (il ne comporte aucun dialogue), Samudra s’affranchit des frontières linguistiques et auditives. Conformément à leur collaboration avec une association indonésienne qui œuvre en faveur d’une réduction de 70 % de l’utilisation du plastique dans son pays d’ici à 2025, les concepteurs souhaitent sensibiliser le jeune public du monde entier à la pollution et les inciter à se mobiliser, tout particulièrement contre les déchets plastiques.

Dot’s Home met en lumière les injustices du système de logement aux Etats-Unis, en soulignant les choix que les communautés marginalisées sont amenées à faire lorsqu’elles y sont confrontées. On y suit le voyage dans le temps d’une jeune fille noire de Détroit qui habite la maison de sa grand-mère et revit des moments clés de l’histoire de sa famille, à la croisée de différentes thématiques : origines ethniques, lieu de résidence, foyer. Le jeu s’inscrit dans le cadre du projet Rise-Home Stories, une collaboration entre des auteurs multimédias et des militants de diverses associations locales qui œuvrent en faveur du logement, de l’accession à la propriété et de la justice raciale aux États-Unis.

Propos recueillis par Emma Buttin, chargée de mission TV, New Media et VR (New York)
Twitter : @emmabuttin

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Jessica Lindl est vice-présidente d’Unity Technologies, en charge du département Unity Social Impact. Depuis plus de 15 ans, Jessica milite pour la prise en compte de l’impact social dans tout projet, et s’emploie à créer des opportunités de formation et débouchés professionnels dans le monde entier, au sein de diverses organisations à but lucratif ou non, comme Unity, Common Sense Media, GlassLab, Scientific Learning et Houghton Mifflin Harcourt. En 2012, ses activités dans ce domaine l’ont amenée à utiliser Unity pour la première fois. Elle a tout de suite été conquise par les très nombreuses possibilités qu’offre la plateforme pour générer des changements. Jessica est vice-présidente d’Unity Technologies, en charge de l’impact social et de l’éducation. Son département a pour objectif de donner aux créateurs et aux utilisateurs de Unity de rendre le monde meilleur grâce aux programmes et applications de la technologie 3D en temps réel. Elle a longtemps séjourné en Inde et en Asie, où elle a travaillé pour des ONG internationales à la mise au point de nouvelles approches destinées à éradiquer l’analphabétisme chez les jeunes les plus défavorisés. Elle siège au conseil consultatif de GSV Ventures et est membre de Pahara-Aspen. Elle est diplômée de la Haas School of Business de l’université de Berkeley, où elle a obtenu une maîtrise en administration des affaires (spécialisation en entrepreneuriat et éducation).

Traduction: Fast ForWord

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